mardi 10 janvier 2012

On a les RH qu'on mérite


Secteur Public /Secteur privé è On a les RH qu’on mérite !
Tous les DRH le savent : le taux de turn over le plus élevé au sein du comité de direction est sur le poste de DRH. Il suffit de regarder autour de nous pour trouver de nombreuses illustrations. Depuis bien longtemps, je n’avais pas observé tant de DRH en transition, licenciés ou voulant quitter leur poste. Pour certains, nous sommes à la fin d’un cycle, celui des restructurations post-crise financière de 2008 dans le privé ou de la première vague de réformes liées à la RGPP de 2007 dans le public. Or, le DRH est en première ligne dans les transformations, et doit mobiliser de nombreux talents : organisationnels, prospectivistes, managériaux, leadership, financiers, communicants ou encore juridiques. Trop de talents ? ou fusible efficace ?
Les Drh proposent, mettent en œuvre, veillent, alertent ; ils ne dirigent pas seuls
Imaginer qu’un DRH puisse mettre en place un PSE dans le privé ou des suppressions de poste dans le public sans les dirigeants est une malhonnêteté intellectuelle. Ni le droit, ni le fonctionnement de l’entreprise ou de l’administration ne le permettent.
En droit public, le DRH n’a au plus qu’une délégation de signature, c’est-à-dire qu’il peut signer un acte administratif bien identifié, s’il en a eu l’autorisation sur le fond auparavant. Ce n’est pas une délégation de pouvoir. La suppression de poste, par exemple,  doit être approuvé par les assemblées générales chez se opérateurs d’état ou dans la fonction publique territoriale.
En droit privé, la délégation du DRH peut être plus large que dans le public, le DRH pouvant être président de CE et conduire les étapes d’information et consultation préalables, ainsi qu’organiser les entretiens préalables; il n’en reste pas moins qu’organiser un PSE n’est qu’une conséquence sociale d’une décision stratégique souvent prise dans un autre métier, celui qui supprimera les postes. On imagine mal un DRH prendre une telle initiative sans la direction concernée, et sans le comité de direction.
En dehors des questions de licenciement, le DRH s’il participe à la définition des orientations stratégiques, c’est en jouant un rôle d’alerte, de veille ou de juriste. Le DRH va apporter des informations sur les compétences actuelles et leur évolution possible, comparera les rémunérations avec le marché, présentera les nouvelles données sociologiques et leurs impacts sur le management ou la gouvernance, dressera un bilan des procédures juridiques liées aux transformations. Tout ceci n’est pas la décision, mais y participe.
Il est cependant deux points qui peuvent participer à créer le doute : le rôle d’influence du DRH et sa dimension leadership.
Le rôle d’influence tout d’abord, est celui inquiète particulièrement les dirigeants. L’influence du DRH et celle qui alerte sur les évolutions de tendances, notamment sociologiques ; ce n’est pas l’influence de la petite parole qui discrètement oriente la décision sur les cas individuels. L’influence du DRH est prospective, elle participe à comprendre les mouvements et anticiper les changements.
Le DRH est aussi porteur d’un véritable leadership, notamment en secteur public. Si l’on accepte que le leadership puisse être aussi celui qui permet les transformations, la réussite des réformes, la modernisation de la structure, le DRH, qui aidera à définir et communiquer sur la stratégie, mettra en place les conditions d’appropriation du changement, identifiera les compétences qui permettront le changement,  organisera la planification stratégique et opérationnelle, ce DRH sera un acteur central du changement. C’est le leadership de métier, celui qui ne concurrence pas le leadership charismatique ou de légitimité (des urnes).
L’identité RH d’une entreprise ou un établissement public est créée et portée par les dirigeants
Les valeurs, la stratégie, l’organisation sont les fondements de l’identité RH. Dans un ouvrage récent, « Réinventer les RH », Gilles VERRIER démontre la globalité de l’identité RH d’une entreprise, au cœur de laquelle on trouve les dirigeants. La démonstration vaut aussi bien pour une administration. Chaque entité construit sa propre identité, aucune ne se reproduit, et ceci vaut aussi d’une collectivité territoriale à une autre. Gilles Verrier a compté 8 facteurs d’identité RH, parmi eux, le sens et la mission de l’entreprise, l’ambiance au travail et la rétribution :
·       Le sens et la mission de l’entreprise : si le DRH se voit confier la responsabilité de la communication interne, il ne faut pas oublier que la communication est un métier du comment, et non du quoi. Le communiquant ne crée pas la stratégie, il la porte, l’exprime, la fait partager. Le sens et la mission viendront des textes (secteur public), du plan stratégique, des discours des dirigeants. Ils seront animés par des valeurs internes qui doivent porter la réalité de la vie dans l’entreprise. Mettre en avant la valeur de la transversalité dans une administration qui vient de réaffirmer son organisation par métier est contre-productif : cela revient à dire que les valeurs n’ont pas de fondement.
·       L’ambiance au travail est sans doute complexe à appréhender ; elle est dans tous les cas globale. On peut y trouver les notions de qualité des relations interpersonnelles, ouverture, accessibilité des dirigeants, transparence… Ce facteur a aujourd’hui une place indispensable, et doit faire l’objet d’un véritable travail pro-actif et organisé, relayé sur internet. La e-réputation de votre structure est très intéressante à observer sur ce thème.
·       La rétribution : le DRH a certes une responsabilité réelle dans la politique rémunération de l’entreprise ou de l’administration, il doit écouter le marché, réaliser des simulations, proposer des outils de contrôle, mesurer les résultats. Cependant, que ce soit dans le public avec les grilles indiciaires et la rémunération au point, ou dans le privé, le sujet est forcément lié à un autre métier, le contrôle de gestion, et aux dirigeants si l’on sait que dans les administrations ou les entreprises de service, la part de la masse salariale sur le total des charges est en général proche des 60%. Les réformes engagées à travers la RGPP a d’ailleurs fait du levier « budget » sa première arme : il n’est pas rare de trouver des administrations ou opérateurs d’état qui doivent assurer des baisses de budget (leurs ressources) de 15% en 3 ans. Il est impossible d’imaginer que la masse salariale n’en sera pas affectée. Il reviendra au DRH de faire des propositions de baisse de masse salariale, tout en gardant les compétences nécessaires aux transformations et à la gestion, la formation qui permet la mobilité et la politique rémunération qui suit le marché. Il n’est pas honnête de faire du DRH l’initiateur de la pression sur la masse salariale. Ce sont les dirigeants politiques font les choix.
Au-delà des thèmes identifiés, il existe une dimension globale à chaque organisation, son intelligence collective. Si l’on admet que les produits bancaires créés en plusieurs mois peuvent être copiés en quelques heures, ou qu’avec les réseaux sociaux, il n’est plus de propriété intellectuelle définitivement protégée, il reste aux dirigeants l’essentiel, créer l’intelligence collective, c’est –à-dire l’ensemble des relations entre les uns et les autres (les métiers, les générations, les produits, les étages) pour se développer. Plus besoin de se demander qui du DRH ou du DG est propriétaire de cette intelligence, elle appartient par essence à la collectivité. Les dirigeants créeront les conditions d’existence et de vitalité de cette intelligence, et tous les métiers y participent.
Messieurs les dirigeants, soyez en sûrs, vous avez les RH que vous méritez !

01.09.2011
Géraldine VAN DER BEKEN