L'entretien annuel est une pratique
de plus en plus répandue dans les entreprises, quels que soient leur secteur
d'activité et leur taille. Mais paradoxalement, il reste la pratique la plus
malmenée, de part et d'autre, en termes de gestion des RH, de management, et de
relations humaines. Le manque de méthode et d'outils pour structurer
correctement un entretien de cette nature a bien souvent discrédité la démarche
et sa cohérence d'ensemble.
Un exercice délicat
Il est vrai qu'il s'agit d'un
«exercice» difficile et délicat, tant par sa situation de face à face
incontournable que par le contrôle en temps réel d'un rapport de force (positif
ou négatif selon les cas) ; ou encore par son contenu professionnel structurant
un engagement pour un an, et parfois des orientations personnelles à plus long
terme.
Il est donc opportun d'apporter
quelques précisions de fond et des éléments de méthode qui en permettent la
maîtrise et l'efficacité.
Un entretien annuel ne s'apparente
pas aux conversations que génèrent les multiples rapports humains dans
l'entreprise, même lorsqu'elles portent sur les activités professionnelles des
uns ou des autres. En effet, la conversation, par son caractère informel et
spontané, peut contribuer au maintien et à l'amélioration des relations
interpersonnelles, tout comme à leur dégradation, d'ailleurs ! A ce titre, la
conversation n'est pas propre au milieu professionnel.
Une logique contractuelle
L'entretien, au contraire, constitue
un des principaux outils du management et contribue à une organisation
efficace, en visant à mettre en adéquation les objectifs généraux de
l'entreprise, du service, de l'équipe de travail avec les objectifs
professionnels et personnels de chacun de ses membres.
Il s'agit donc d'y définir, sur la
base de l'expérience et de l'évaluation de l'année écoulée, ce qui va
structurer l'activité pour une période donnée : priorités stratégiques,
missions permanentes ou temporaires, objectifs, conditions particulières, etc.
Mais dans tous les cas, un entretien vise à structurer et gérer des rapports
professionnels de type contractuel.
Il faut évidemment tenir compte du
fait qu'un entretien met en jeu des individus dans leur subjectivité, et que la
limite entre conversation et entretien est parfois étroite. Certes, la
conversation peut se montrer vite anarchique et stérile, mais elle véhicule
souplesse et chaleur humaine. L'entretien, quant à lui, est structuré et
productif, mais peut apparaître froid et impersonnel, nuisant ainsi à la
qualité du but recherché.
Une méthodologie rigoureuse
La régulation de l'entretien doit
donc tenir compte de cette réalité, en ne refusant pas par principe des moments
plus “détendus”, mais elle doit s'appuyer sur une méthode rigoureuse qui en permette contrôle et profit, de
ses tenants à ses aboutissants.
Il est possible de décrire cette
méthode en quatre phases successives :
1. Une phase d'information, dans laquelle les
interlocuteurs se mettent à niveau sur les données factuelles et les objets
professionnels qui servent de base à l'entretien.
2. Une phase de consultation (d'écoute), où chacune des
deux parties exprime son avis sur les différents sujets de l'entretien. Il peut
exister à cet effet des trames de support listant les principaux sujets à
aborder.
3. Chacun ayant bien compris le point de vue de l'autre,
on passe alors, le cas échéant, à une phase de discussion/débat, qui prend le
tour d'une concertation ou d'une négociation, selon la nature des convergences
et des divergences constatées.
4. Enfin, il s'agit de dûment formaliser ce qui résulte
de l'entretien : c'est le document de travail qui va structurer le fond de
l'activité de l'individu pour un an.
Mais attention : la séparation
formelle de ces différentes phases est nécessaire au succès de l'entretien.
Une cohérence managériale
Il reste que les entretiens annuels
doivent s'intégrer à l'ensemble des outils du management, afin de ne pas perdre
une cohérence d'ensemble sans laquelle il n'est pas de crédibilité à ce genre
d'exercice. Ils s'accommodent aussi des multiples échanges, tout au long de
l'année, qui font vivre le projet initial.
De même que c'est la symbiose de
tous ses éléments qui permet à un être organisé de vivre, c'est la corrélation
de tous les outils du management qui permet à un système organisé comme une
entreprise de devenir mobile et performant. On peut cependant considérer que
les entretiens – pour peu qu'ils soient judicieusement préparés, correctement
menés et dûment suivis – sont à cet endroit au cœur de la dynamique recherchée,
comme la pompe qui amène l'oxygène à chacun de nos membres, de nos muscles, de
nos tissus.
En effet, les principaux éléments
par lesquels le management est exercé théoriquement par une direction sont
identiques à ceux que les entretiens permettent d'établir pratiquement. Il
serait dommage de s'en priver. Les entreprises devraient y réfléchir davantage
; et avoir recours à la formation nécessaire à tous niveaux, le cas échéant.